Deux temps, deux mouvements aussi éloignés l’un de l’autre que la vie et la mort, mais réunis en un élan indiscernable. Il y a dans le travail de Samuel Yal un appel constant pour des pôles qui, loin de se contredire, au contraire, se complètent en laissant échapper un souffle discret, un soupir fragile mais incommensurable. Faisant écho à une dialectique de la nature qui voit ses forces adverses cohabiter, se combattre, interagir l’une sur l’autre et composer les deux faces d’une même réalité, il est toujours question chez Samuel de jouer sur ces antinomies aux contours existentialistes : le corps et l’esprit, l’intérieur et l’extérieur, le vide et le plein, le mouvement et le repos.
Aussi est-ce pourquoi on perçoit de ces œuvres l’ambivalence d’une esthétique où, d’un côté, se déploie l’expression de la plénitude, de la lenteur et peut-être de la vulnérabilité – à l’image de ces visages clos, un peu méditatifs et faits de porcelaine – et, de l’autre, une forme de fulgurance chaotique à travers la dispersion tous azimuts, la déflagration et la déconstruction. C’est ce qui permet, en s’attachant aux processus de contraction et d’éclatement, de révéler une fluence entre deux mouvements contradictoires ; fluence qui manifeste la concrescence, le changement d’état et le passage d’une réalité à une autre. En cela, on y discerne jusque une forme d’âpreté, si ce n’est de violence inorganique qui pourtant arbore une dimension créative sinon créatrice. Effectivement, de par la façon avec laquelle les œuvres semblent se maintenir en un temps suspendu – comme figée par un appareil photographique qui interromprait le cours des choses, ou littéralement en adoptant une configuration flottante –, il semble toujours que soit dévoilée, de façon paradoxale, la promesse d’une naissance nouvelle. Le tour de force est alors d’affleurer à des questionnements universels en se portant à l’échelle du corps, de l’homme, de soi sans doute.
Image de couverture : Impression, 2012 visage, porcelaine, 30 x 17 x 10 cm